Appréciation et gentillesse
texte et photos : Norma A. Hubbard traduction : Amelie Delisle Van Wijk (décembre 2020)
Suite à mon déménagement dans une zone urbaine après avoir vécu à Hemmingford, j’étais triste à l’idée de ne plus avoir accès à toute cette nature que j’aime tellement. Néanmoins, j’ai une cour arrière où il y a quelques arbres. Pas les âcres de forêt dont j’étais propriétaire auparavant, mais suffisamment d’espace pour installer des mangeoires à oiseaux. Étonnamment, ça a pris peu de temps avant que mes mésanges bien-aimées, puis les cardinaux, les pics-bois, les juncos, les roselins, les sittelles torchepots et un geai bleu de temps en temps ne trouvent les mangeoires. Toutefois au début, il n’y avait que ce que je considérais comme des « oiseaux de ville », rien de bien excitant à observer. Ceux-ci comprennent ces petits oiseaux bruns que nous voyons souvent en train de gratter le sol, ou comme mon frère les appelle, les « oiseaux de terre ». La majorité de mes « oiseaux de terre » étaient des bruants, ces petits oiseaux chanteurs que j’ai appris à aimer puisqu’ils volettent autour de mes mangeoires, ce qui me rend heureuse.
Il existe plusieurs espèces de bruants dans notre région : le bruant familier (Spizella passerine); le bruant hudsonien (Spizella arborea); le bruant chanteur (Melospiza melodia); le moineau domestique (Passer domesticus); et le bruant fauve (Passerella iliaca). Il existe tellement de bruants qu’il peut être difficile de les différencier, particulièrement parce qu’ils mangent, puis s’enfuient rapidement des mangeoires. Je suis certaine que ce sont des moineaux domestiques qui s’alimentent à mes mangeoires.
En 1851, les moineaux domestiques ont été introduits à New York par des voyageurs venus d’Europe. Maintenant, on les retrouve partout en Amérique du Nord, à l’exception des endroits dans le Grand Nord comme l’Alaska. Les moineaux domestiques se sont adaptés à la vie urbaine et on les retrouve davantage en ville qu’en campagne, il est donc plus probable de les apercevoir dans le village et autour de celui-ci que dans nos forêts. Ces minuscules oiseaux sont assez confortables autour des humains. Il y a toujours eu quelques types de bruants dans le comté, mais pas autant de moineaux domestiques que ce que je vois chez moi en zone urbaine.
De nombreux ornithologues amateurs considèrent les moineaux domestiques comme une espèce étrangère et envahissante. Les moineaux domestiques sont de féroces compétiteurs en ce qui a trait au territoire, y compris pour les nichoirs des autres oiseaux comme ceux des merle bleus et des hirondelles. Les moineaux sont des opportunistes et nicheront dans n’importe quel espace, tirant profit des trous dans les immeubles ou les corniches, ou dans à peu près n’importe où autour d’une maison. Ils nichent rarement dans des arbres. Ils pondent de 1 à 8 œufs à la fois et peuvent avoir jusqu’à 4 couvées par saison. Ils construisent parfois leurs nids un à côté de l’autre et en partagent un. Ils réutilisent aussi régulièrement leurs nids. Le plus vieux nid de moineau domestique enregistré avait environ 16 ans.
Régulièrement, des bandes de moineaux domestiques se baigneront ensemble dans l’eau et dans la terre, aussi nommé bain de poussière; voici donc la raison pour laquelle mon frère les appelle des oiseaux de terre. Les mâles ayant le plus de noir sont habituellement les plus dominants de la bande. Pour s’accoupler, ils sautilleront, puis se tourneront de côté et feront parfois la révérence devant les femelles, tout en ébouriffant leurs poitrines et en ouvrant leurs ailes et les plumes de leur queue pour paraître plus gros. Ils ont tendance à dominer les femelles à l’automne et en hiver, mais ce sont les femelles qui dominent au printemps et en été.
Alors que cette année s’achève et que nous pensons à cette période que nous vivons, j’aimerais vous raconter une légende cherokee. L’histoire commence avec un moineau blessé, incapable de voler vers le Sud alors que l’hiver approche. Le moineau dit à sa famille de s’envoler et de ne pas s’inquiéter, qu’il fera de son mieux pour survivre à l’hiver glacial. Le moineau va voir les arbres pour leur demander de l’aide, demandant à chacun d’entre eux de lui offrir un abri contre le froid. Le grand chêne refuse, tout comme le doux érable et plusieurs autres arbres. Seul le pin, ayant les plus petites feuilles, de simples aiguilles, offre de l’aider. Le moineau survit à l’hiver, niché dans les branches du pin. Puisque toute la nature est considérée comme une famille, le Créateur est déçu que les autres arbres n’aient pas aidé un frère. Il décrète alors qu’à partir de ce moment, tous les arbres perdraient leurs feuilles chaque hiver, à l’exception du pin, qui resterait toujours vert grâce à sa générosité envers le moineau. Alors que l’hiver commence, souvenons-nous d’être bienveillants les uns envers les autres et d’apprécier ce que nous avons plutôt que d’attendre ce que nous n’avons pas.
Sources : All About Birds, Cornell University [en ligne]; First People, Legends, Why The Trees Lose Their Leaves-Cherokee [en ligne]