La conservation des semences de légumes
(première partie) par Benoît Bleau (octobre 2015)
Pourquoi conserver des semences de légumes ?
Principalement pour préserver les caractéristiques génétiques que l’on juge particulièrement intéressantes et différentes de ce que l’on vend de nos jours dans les épiceries, où le nombre de variétés de chaque légume est relativement limité. En effet, il est assez rare d’y trouver plus de trois variétés de laitues, de tomates, de haricots, de pommes de terre, etc. Et, pourtant, il en existe des centaines. Alors pourquoi n’en retrouve-t-on pas plus? Tout simplement parce que l’industrie agroalimentaire, pour différentes raisons, les a volontairement écartées. Par contre, dans les marchés fermiers régionaux, on a le plaisir de découvrir des couleurs, des odeurs, des textures et des saveurs rarement offertes dans les chaînes de distribution alimentaire. C’est pour ça que si par bonheur je mets la main sur une variété intéressante, je sélectionne un beau fruit ou légume selon le cas et j’en conserve les semences pour une année future. Autre avantage indéniable de cette pratique est qu’ en cultivant moi-même la plante en question, je m’assure qu’elle s’adapte bien à mon environnement.
Quelques précisions s’imposent toutefois. Puisque nous parlons ici de semences, il sera donc question de reproduction sexuée et de variétés cultivées par l’homme qu’on appelle cultivars, contraction du terme anglais « CULTIvated VARiety ». On retrouve sur le marché principalement deux types de cultivars. D’abord les cultivars hybrides F1 qui ont été développés par les compagnies semencières modernes pour leur rendement soi-disant supérieur, mais surtout parce qu’il est impossible de les reproduire par la semence en conservant les caractères des parents. Ensuite un second type de cultivars qui sont à pollinisation ouverte ou libre, issus de la sélection effectuée par des paysans avant l’arrivée de l’agriculture moderne et dont les semences sont facilement reproductibles. Ces semences dites ‘traditionnelles’ sont aussi appelées ‘semences héritages’, ‘semences du patrimoine’ ou encore ‘semences ancestrales’. C’est donc ce type de cultivar qu’on cherch- era à conserver pour le plaisir de la chose et pour les générations futures. À noter qu’avant de semer ces variétés, il faudra connaître la distance à maintenir entre les différents cultivars pour en assurer la pureté. En effet, s’ils sont trop rapprochés, il y a un risque de pollinisation croisée avec un autre cultivar, ce qui modifierait les caractères du parent que nous voulons reproduire.
Les tomates
À chaque famille de plantes et même à chaque genre de plantes correspond une technique de conservation. Parlons d’abord des solanacées, c’est-à-dire de la famille des aubergines, des piments, des pommes de terres, du tabac et des … tomates. Ces dernières représentent ce qui me manque le plus de l’été car, des premiers gels à la mi-juillet, je suis incapable de manger celles qu’on retrouve en épicerie. Alors, raison de plus de les savourer quand elles sont abondantes au jardin. Il existe des centaines de cultivars de tomates tous aussi succulents les uns que les autres. À nous de les découvrir.
Comme les tomates sont des plantes ‘auto- fécondes’ et comme leur pistil est généralement court, le pollen étranger peut difficilement l’atteindre, donc une distance de 5 mètres suffit pour isoler deux cultivars. Par contre, certains cultivars plus anciens ont un pistil plus long, ce qui facilite la pollinisation par les insectes; dans ce cas, une dis- tance de 50 mètres entre deux cultivars est alors conseillée.
Comment procéder pour conserver ces semences.
- Commencer par laisser mûrir quelques fruits (ici des to- mates) plus longtemps sur le plant.
- Trancher ces tomates en deux.
- Retirer les graines avec la pulpe et déposer le tout dans
- Lorsqu’il y a formation de moisissure à la surface, vider le contenu dans une passoire assez fine pour retenir les graines puis rincer à l’eau tout en agitant légèrement avec les doigts pour nettoyer les graines et dégager la pulpe.
- Étendre les graines sur un essuie-tout ou un linge à vaisselle, afin de les laisser sécher.
- Prendre toujours bien soin d’identifier la variété, car rien ne ressemble plus à une semence de tomate qu’une au- tre semence de tomate. S’assurer aussi qu’aucune graine ne reste dans le tamis avant de l’utiliser pour un autre cultivar.
Malheureusement, je manque d’espace pour vous parler d’autres types de plantes, mais il existe beaucoup de ressources à la bibliothèque municipale ou sur le web pour vous aider en attendant le prochain bulletin, où je vous en dirai un peu plus. Bonne récolte!