Le régistre de Bogton: 1857 – 1859 : “Highwines” et “Saleratus”

par Mary Ducharme (Traduction : Yvon Paquette et Mario Leblanc)  (août 2021)

En 1993, Robert Hadley fit don aux Archives du régistre d’un magasin, contenant des inscriptions de 1857 à 1859. Plusieurs pages sont couvertes des deux côtés de découpures de journaux, les autres pages contiennent des noms de clients et des comptes du magasin.

Le terrain où se trouve maintenant la banque CIBC appartenait à Andrew Bedell. Ce dernier a vendu son magasin, et tout son contenu, à Edmund Kenney et George William Keddy en 1883. Ces deux hommes, importants hommes d’affaires en plus d’être beaux-frères, avaient loué l’immeuble Scriver (coin sud-ouest de la rue Frontière) et les deux magasins étaient connus sous le nom de Magasins Keddy et Kenney. Il y avait aussi un magasin Kenney à Hallerton au coin de Kenney Side Road et de la rue Quest. Cependant le régistre ne semble pas s’appliquer à ces magasins.

Cette carte datée 1880 montre les terrains des descendants Keddy. Le magasin était à 147 Chemin Bogton.

 

Les Keddy finirent par posséder une “vaste étendue de terrains à l’est de Hemmingford”(Maynard). Dans cette région, il y avait un autre magasin Keddy à Bogton. Les clients listés résidaient à Bogton ou dans les environs. À l’intérieur de la couverture du régistre, on retrouve le nom de Christiana ( McNaughton) Keddy ainsi que celui de son époux, John Keddy, qui a ajouté sous son nom : Bogtown est ma place de résidence. John est inscrit dans le recensement de 1861 comme fermier et commerçant. Il gérait les biens immobiliers Keddy avec ses frères Isaac et Robert.

Christiana (McNaughton) Keddy, 1836-1908

Christiana colla des découpures du journal Gleaner sur les pages du régistre, et ce “scrapbook” nous en dit long sur la vie au milieu du 19 ème siècle : comment enlever la graisse d’essieu sur les vêtements et comment “friser” des plumes pour décorer des chapeaux était d’intérêt pour la plupart des femmes de cette époque. Elle découpa aussi un article sur les horribles blessures sur le corps provoqués par des corsets trop serrés. Des articles sur le tricotage de sous-vêtements, de sous-vestes à haut col et d’un capuchon pour dame, trouvaient leur place dans le régistre. On y voit aussi l’image d’une robe très élaborée, probablement trop “fancy” pour les femmes de Hemmingford de l’époque, mais qui leur permettait peut-être de rêver. Cette section se termine par divers poèmes sur l’intensité de l’amour entre mari et femme, la jeunesse perdue, la mort et la foi religieuse.

À l’époque du régistre, John était à la fin de la trentaine. Il écrivit un texte ambigü, peut-être parce qu’il ne se sentait pas apprécié à sa juste valeur. Il mourut en 1883, la même année où son fils, George William Keddy, achète la magasin de Bedell.

John Keddy 1822-1883

John Keddy est mon nom,
L’Angleterre est ma nation,
Bogton est ma place de résidence
Une habitation des plus charmantes.
Quand je serai mort et dans ma tombe
Et que tous mes os seront pourris
Regardez dans ce livre et vous verrez
Qu’on m’a complètement oublié.

En regardant plus attentivement les comptes, on constate que peu d’inscriptions sont aux noms de femmes. Ce qui motivait les hommes au magasinage s’explique probablement aux nombreux verres et pintes de whisky qui allongeaient la facture. John Orr était un amateur de “highwine”, une liqueur puissante produite à partir de cuves de rhum durant la distillation. Si l’épouse trouvait une collection de bouteilles vides dans le grenier, l’excuse classique était de dire que le “highwine” était un remède efficace en plus d’être le produit idéal pour nettoyer les armes à feu! Joseph Noël achetait des gallons de mélasse qu’il utilisait comme édulcorant, mais il en ajoutait également à de la purée de céréales pour produire du rhum 80 proof. Même si c’était une denrée plus lucrative que de l’argent comptant, bien des familles souhaitaient qu’elle soit bannie pour toujours de leur existence.

Une page du régistre de Bogton

La farine était achetée au baril, mais le sucre était un luxe. Le thé, le café et le tabac étaient sur la plupart des notes, mais rarement la viande et autres aliments. Un produit populaire était le “saleratus”, un mélange de potassium et bicarbonate de soude, mieux connu sous le nom “soda à pâte”. Ce très pratique levain était sur le marché depuis 1846.

Le calico à la verge était le tissu le plus populaire ; aucune mention de la soie et du lin dans le régistre. Pour les hommes, le matériel pour les chemises et le denim rayé bleu sont listés. Thomas McManus achetait de la peau de veau et du cuir à semelles, mais on ne voit aucune mention de vente de souliers.

John and Christiana raised a large family, and the marriages of their children attached them to numerous Hemmingford families. The Bogton ledger, and other research materials are available for viewing at the Archives. Many thanks to Robert Hadley and Mickey Maynard, both descendants of the Keddy/ Kenney families. Their contributions to the family history lay a foundations for other historians to expand. Many thanks to Dan Mark and Myrna Paquette for pointing the way to further resources.