Petite menteuse?
texte et photo : Norma A. Hubbard traduction : Amelie Delisle Van Wijk (décembre 2024)
Les oiseaux ont-ils une personnalité? Nous donnons souvent des traits humains aux oiseaux en fonction de leur apparence et de leur comportement. Le geai bleu ne vous a-t-il jamais paru autoritaire à sa manière d’atterrir sur une mangeoire en chassant tous les autres oiseaux? La mésange ne vous semble-t-elle pas gentille, car elle est toute petite et mange souvent à même nos mains? Un petit oiseau, qui semble aussi gentil que la mésange, s’est plutôt bâti une mauvaise réputation à titre de petit menteur. Qui est ce pauvre oiseau? Pourquoi a-t-il obtenu cette réputation? Il s’agit de la mésange bicolore (Baeolophus bicolor), et même son nom ne convient pas à une menteuse.
Selon l’American Bird Conservancy, le nom anglais de la mésange bicolore (Tufted Titmouse) est dérivé des mots anglo-saxons « tit » et « mase », qui signifient essentiellement « petit oiseau ». Au fil du temps, « mase » est devenu « mouse » (souris), ce qui rend son nom plutôt drôle pour un oiseau.
La mésange bicolore est territoriale et reste habituellement toute l’année dans le même secteur avec son partenaire. Toutefois, pendant les mois d’hiver, elle se joint à sa cousine, la mésange. Elles font toutes deux partie de la même famille scientifique, les Paridae. En ce moment, trois mésanges bicolores côtoient nos mésanges. La troisième est très probablement une progéniture qui quittera au printemps pour trouver son propre territoire et se reproduire. Chaque couple n’a qu’une seule couvée de trois à neuf œufs par saison et la femelle est chargée d’élever les petits. Malheureusement, en raison de ses prédateurs, cet oiseau ne dépasse habituellement pas l’âge de 2 ans, ce qui est plutôt court lorsqu’on considère que la plus vieille mésange bicolore jamais observée a vécu 13 ans. Néanmoins, sa population est en croissance et elle est considérée de préoccupation mineure à l’échelle environnementale.
La mésange bicolore est légèrement plus grosse, mais beaucoup plus bruyante que sa cousine. Elle se fait entendre et se joindra à une « bataille » vocale pour aider d’autres oiseaux face à un prédateur. Une de ses vocalises ressemble à « Peter, Peter, Peter ». Elle a une « touffe » de plumes sur la tête, comme le geai bleu et le cardinal, ce qui lui accorde une silhouette unique par rapport à la mésange. Cet oiseau visite régulièrement les mangeoires et adore les graines de tournesol, même si elle est connue pour prendre la plus grosse graine qu’elle peut trouver, même des glands difficiles à percer avec son petit bec!
En plus de graines et de baies, la mésange bicolore mange beaucoup d’insectes, comme les chenilles, les fourmis, les guêpes, les araignées et les escargots. Elle est donc la bienvenue dans nos jardins.
J’ai aperçu une mésange bicolore pour la première fois en 2012. Plusieurs années se sont écoulées avant que j’en observe une autre. Maintenant, elles semblent venir régulièrement à la mangeoire. Avec le changement climatique, cet oiseau qui venait auparavant du sud se trouve maintenant dans le sud du Québec et de l’Ontario. Elle habite les forêts matures, le fait de laisser les arbres grandir et les arbres morts sur place lui offrent donc un endroit pour construire son nid. De plus, une mangeoire bien garnie l’attirera dans nos cours en hiver. D’un autre côté, souhaitons-nous vraiment attirer cet oiseau connu comme étant un menteur? L’est-il vraiment?
Selon un mythe Cherokee, « La mésange bicolore a menti au peuple sur la manière de tuer un monstre prédateur, alors que la mésange a dit la vérité. » Par conséquent, les Cherokees associent la mésange bicolore au mensonge, au rapportage et à la vantardise. Au fil du temps, puisque ces deux cousines se ressemblent tellement et ont des mélodies similaires, ces oiseaux servent à enseigner aux enfants qu’il est difficile de reconnaître un mensonge de la vérité. D’autre part, tout n’est pas perdu pour notre petite menteuse. Dans d’autres cultures, comme dans la mythologie celtique, la mésange bicolore représente «une intuition accrue» et «un signe de curiosité intellectuelle et d’éveil spirituel». De plus, certaines cultures autochtones croient que cet oiseau symbolise la curiosité, la joie et la débrouillardise. J’aime mieux cette réputation que celle de menteuse.
Alors que l’hiver s’installe, j’ai ajouté plus de graines pour nourrir mes oiseaux et je pardonnerai cette petite menteuse. Je l’accueillerai chez moi, avec cet esprit des Fêtes, puisque je sais que ce gentil oiseau apporte un peu de joie dans le froid de l’hiver.
Sources [en ligne] : All About Birds, Cornell University; American Bird Conservancy; Animal Omens; Native Languages of the Americas