Semences de vie!
par Benoît Bleau (édition octobre 2014)
L’automne est ma saison préférée, vous l’ai-je déjà dit? Les chaleurs de l’été se dissipent pour laisser la place aux températures plus fraiches et aux premières gelées. Cette période de l’année où on constate l’abondance des récoltes, nous démontre encore une fois la grande générosité de Dame Nature. C’est l’occasion pour plusieurs de faire conserves et réserves pour l’hiver qui approche. C’est aussi le bon moment de choisir nos plus beaux fruits et légumes du jardin et d’en conserver les semences pour la prochaine saison de culture.
Depuis les débuts de l’agriculture, les paysans se font un devoir de préserver l’héritage génétique que la nature leur procure. Ils conservent et sélectionnent, année après année, le fruit des plantes qui se démarquent pour leurs caractéristiques tant olfactives, gustatives, nutritives que productives. C’est ce qui nous permet aujourd’hui d’avoir accès à près de 1,5 millions de variétés de graines de cultures agricole dans les diverses banques de semences nationales et locales à travers le monde.
Ce processus de sélection par les paysans a toujours été un droit universel étant donné que personne ne peut se déclarer maitre de la nature et donc s’accorder la propriété de ce qu’elle nous donne. Les sélectionneurs de semences et les entreprises qui développent leurs propres croisements génétiques, ont par contre, étés autorisés à exiger des droits (Autorisations de culture) à ceux qui utilisaient leurs variétés ou cultivars, mais jamais, ils n’étaient allés jusqu’à empêcher un paysan de conserver ses propres semences provenant d’une pollinisation ouverte.
Depuis le développement par quelques multinationales des Organismes Génétiquement Modifiés (OGM) et les en- tentes de libre échange (ALE) entre divers pays, les règles ont changé au profit des plus forts. On constate une volonté claire de contrôler tout ce qui est vivant, végétaux ou animaux et de s’accaparer les meilleures terres pour les cultures d’exportation. On assiste de plus en plus à l’adoption de règlements, comme ce fût le cas en 2010 en Colombie avec la résolution 970 qui interdisait aux agriculteurs colombiens de conserver leurs semences, afin de permettre aux entreprises privées et aux transnationales de s’attribuer le monopole du marché. Curieusement, ces même transnationales financent, directement ou via des fondations, les projets de banques de semences internationales, telles que la Réserve mondiale de semences de Svalbard en Norvège. Il est permis de douter de leurs intentions réelles!
Heureusement, des regroupements de paysans et de citoyens se forment un peu partout pour dénoncer cette situation et pour conserver collectivement ce patrimoine génétique si fragile et garant de la biodiversité. C’est le cas au Canada de Semences du Patrimoine qui permet la sauvegarde et l’échange de milliers de variétés de semences chaque année sur une base bénévole (seeds.ca); il y a aussi l’organisation internationale GRAIN (grain.org/fr), la Via Campesina qui est un très important mouvement international paysan (viacampesina.org/fr) et l’association française Kokopelli (kokopelli-semences.fr).
Notre devoir de citoyen est de nous renseigner sur ces situations et sur les solutions offertes. Nous pouvons aussi, à notre niveau, nous impliquer et sauvegarder des variétés de plantes que nous trouvons particulières pour différentes raisons. Semences du Patrimoine a publié de bons ouvrages sur la conservation des semences. Aussi, nous avons maintenant, depuis deux ans à Hemmingford, la fête des jardins. Pourquoi ne commencerions-nous pas aussi un échange de semences. Que les personnes intéressées me contactent et nous nous rencontrerons pour en parler. D’ici là, passez un bel automne. Profitez des beaux paysages et des balades en forêt et appréciez chaque instant!